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SERENDIPITY

Agent 0000007 : sur Expo 58 de Jonathan Coe - une lecture critique de Stéphane

29 Mars 2014, 08:44am

Publié par Seren Dipity

Après McEwan, ICI (et Boyd avec Solo), l'espionnage sous fond de guerre froide semble être à la mode. Le dernier Jonathan Coe nous promène de l'Angleterre à la Belgique, à la fin des années 50. A l'heure où Poutine nous rappelle les belles heures d'un régime totalitaire soviétique, cet air de nostalgie tombe bien.

Ca débute comme ça :

"Dans une note datée du 3 juine 1954, l'ambassadeur de Belgique à Londres tansmettait au gouvernement de Sa Majesté une invitation. elle le conviait à participer à une nouvelle Foire mondiale, que les Belges appelaient l'Exposition universelle et internationale de Bruxelles 1958."

Coe est efficace. Très rapidement, la toile historique est posée. Manque le héros. Il arrive.

My name is Foley. Thomas Foley.

Bon, malgré ses lectures de Ian Fleming et malgré un physique à la Gary Cooper ou Dirk Bogarde, Thomas Foley n'est pas Bond, James Bond. Ne vous laissez pas abuser par le fait qu'il boive du Martini (boisson préféré du 007.) En fait, certains collègues le surnomment "Gandhi parce qu'il y avait des jours où l'on aurait cru qu'il avait fait voeu de silence."

Thomas Foley s'ennuie. Dans son travail, au ministère de l'Information où "le gros de son travail consistait à rédiger des brochures de santé et de sécurité publiques pour apprendre aux piétons à traversder les rues sans risques, et aux enrhumés à garder pour eux leurs microbes." Et dans son foyer où sa femme, plus que charmante, s'occupe moins de lui et davantage de leur petite fille qui vient d'arriver. Quand on lui propos de s'occuper d'une des attactions britanniques, il y voit, enfin, la possibilité d'être, d'avoir - conviction de l'homme des années 50 - "un rôle à jouer".

"Le Bureau s'était vu attribuer la responsabilité intégrale du Pavillon britannique, ce qui avait aussitôt déclenché une frénésie de grattage de tête et d'interrogations métaphysiques pour définir cette notion fuyante à rendre fou : l'identité britannique. Que voulait dire être britannique, en 1958? On n'en savait trop rien."

(Pour ceux qui ont lu England, England ! de Julian Barnes, cette interrogation rappelera de bons moments.)

Pour des raisons plutôt drôles (son père a tenu un pub et sa mère était d'origine belge) Thomas Foley se voit confié la direction du Britannia. "Une bonne vieille taverne au charme d'antan, tout aussi britannique que le chapeau melon ou le fish and chips, le fin du fin de l'hospitalité à l'anglaise." A quoi un perturbateur répond : "Pauvres Belges ! Alors, c'est tout ce qu'on va leur offrir ? Des saucisses-haricots-purée, et du pâté en croûte rassis, à faire descendre avec une pinte de brune tiède... c'est à vous donner envie d'émigrer."

Envoyé sur place Thomas Foley découvre non seulement une jolie hotesse avec qui il va tenter de nouer une belle relation mais aussi un nid d'espions dont il n'avait pas idée... malgré les conseils tellement codés qu'ils en deviennent incompréhensibles ou stupides de Radford et Wayne, sorte de Dupont et Dupond des services secrets "avec leurs trilbies et leurs impers, ils sont tout droit sortis d'un roman de gare."

Entre les velléités de romance de Foley avec l'hôtesse belge, son éloignement pas uniquement physique d'avec son épouse et ses soupçons envers son voisin anglais qui profite de son absence, Foley a bien du mal à comprendre les manoeuvres secrètes qui se jouent sous son nez.

Expo 58 n'est pas qu'une comédie d'espionnage avec un héros naïf. Il y a, comme souvent chez Coe, cette douce nostalgie pour un pays, une époque. Et ça fonctionne avec un charme fou.

Coe prend un malin plaisir à nous montrer cette époque bénie des dieux où non seulement on pouvait fumer dans les pubs mais où fumer n'était pas encore considéré comme dangereux.

Et il possède ce sens de l'humour qui peut tout tacler. La séquence où une personne propose, pour évoquer la grandeur de la Grande Bretagne,  de raconter sa lutte contre la défécation désordonnée est hilarante!

Quel beau voyage!

 

Signé Stéphane

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Bonus : Coe parle d'Expo 58 : http://www.youtube.com/watch?v=E9e4eVLNC1I

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