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SERENDIPITY

In the cold, cold night* : sur Temps glaciaires de Fred Vargas - une lecture critique et réchauffante de Gaëlig

4 Mars 2015, 17:15pm

Publié par Seren Dipity

Tout a commencé par un (petit) accident de travail (au cutter... Dieu que ce métier est dangereux), qui m'a obligé à choisir un livre à la va-vite parmi les étagères de service de presse entassés dans notre bureau, avant de devoir aller aux urgences où quelques heures d'attente -et de lecture- m'étaient destinées.

Et c'est Temps glaciaires qui s'est retrouvé dans mon sac. Moi qui étais en recherche intense de bons bouquins  de toutes origines et contextes sauf de la France, - le Prix Landerneau avait réussi, comme chaque année, à me lasser pour un bon moment de la littérature française-, j'étais servie...

Et bien, au final, j'ai dévoré ces 500 pages de polar français où finesse, intelligence, humour, noirceur-mais-pas-trop en font un sacré bon "page turner".

 Il faut l'avouer aussi : c'était mon premier Fred Vargas. J'ose le dire car je sais que je ne suis pas la seule mais pour un libraire, c'est un peu étonnant je vous l'accorde.

 Du coup c'est bel et bien une lecture toute fraîche que vous avez là, il n'y aura aucune comparaison avec les douze autres romans qu'elle a publiés, presque tous aussi best-seller les uns que les autres.

J'ai donc découvert ses personnages absolument truculents : le commissaire nonchalant et mystérieux  Adamsberg et le lieutenant encyclopédique et anxieux Danglard, le mignon lieutenant Veyrenc, l'imposante Violette Retancourt et Lucio, le voisin aux drôles de conseils quand ça nous "gratte"  ... ("C'est une pensée que t'as pensée et que t'as pas fini de penser. Faut pas perdre ses pensées comme ça, Hombre.")

Quelles sensations lorsqu'on rencontre des personnages comme cela en lisant! Pour moi, ils font partis d'une shortlist de personnages qu'on est heureux d'avoir connu, qu'on regrette de laisser une fois le livre lu, avec qui on aimerait aller boire un verre... C'est précieux quoi.

En 2011, Fred Vargas accorait un interview à l'Express et j'y ai glané deux trois phrases comme celle-ci:

"Mais c'est aussi un défi de reprendre les mêmes personnages, de les décrire à chaque fois pour les lecteurs qui ne les connaissent pas. J'aime avoir une bonne troupe de gens ensemble. C'est quelque chose qui doit remonter à l'enfance. Cette culture du groupe, ce côté Club des cinq, me séduit, alors que je suis une solitaire."

 Ajoutons à ces rencontres "humano-littéraires" une intrigue, ou plutôt deux, bien menées et avec pour mots clés : Robespierre et l'Islande. A priori, on n'aurait pas idée d'associer ces deux mots avec leurs univers pour une histoire, et c'est d'ailleurs ce que se disent les flics chargés d'enquêter sur une série de meurtres, qui pourtant, ont en partie, ces deux points communs.

La question est donc : que relie l'Association d'Etude des Ecrits de Maximilien Robespierre, son Paris de la Terreur, ses joutes verbales à l'Assemblée, ces guillotinés et ces bourreaux, à ce pays qu'est l'Islande et où un mystérieux et funeste huis-clos eut lieu dix ans auparavant? On est bien d'accord, tout cela forme une "monumentale pelote d'algues desséchés", dixit Adamsberg.

Je n'irai pas plus loin dans l'intrigue parce que je risque bien de m'y emmêler moi aussi...

 Il me faut également dire que tout autour de ces intrigues et protagonistes, j'y ai aussi trouvé un humour peu banal, en filigranes, principalement disséminé dans les dialogues et qui contribue clairement à faire de cette lecture un moment de détente et de plaisir. C'est décalé, et finement dosé.

Bref, tout est là : les personnages dont on ne pourra plus se passer, leur légèreté et leur complexité, les thématiques de fond (ici le fanatisme, la survie et les mystères familiaux) et... Marc le marcassin (qu'on voit sur la couverture et qu'on apprend à connaître dans le livre...).

On est dans du roman policier un peu à la Agatha Christie, un peu classique mais, tout de même, bien dense. On y voyage beaucoup, dans le temps, dans l'espace... C'est riche et bien foutu. Et non, ça ne fait pas peur, ce n'est pas un thriller, le suspense n'est en effet pas le moteur du livre :

"Je rêve toujours que j'écris un bon suspense et que les lecteurs auront enfin peur. Mais rien à faire, j'écris des histoires où il n'y a pas de suspense et où on n'a pas peur. Ça m'énerve mais c'est comme ça ! Même quand j'écris des romans avec des vampires, comme dans Un lieu incertain, je ne parviens pas à faire peur. On peut dire ce qu'on veut de Mary Higgins Clark, mais elle se débrouille pour installer un suspense qui marche. Et moi, je n'y arrive pas, personne n'a peur... "

 Je suis donc ravie de ma découverte. Je m'en irai bientôt, quand le besoin se fera sentir, retrouver mon pote Adamsberg en me plongeant dans un autre Fred Vargas.

Signé Gaëlig

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* The White Stripes, ICI.

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