Guerre et paix : sur Paix de Richard Bausch et World War Z de Max Brooks - une lecture critique de Stéphane
Faut avouer que la rencontre est assez improbable. Bausch et Brooks. Comme le rappelait Italo Calvino c'est l'incongruité de l'ordre alphabétique d'une bibliothèque qui provoque parfois des découvertes incroyables et serendipitous à souhait.
D'un côté la rigueur et l'économie; le huis clos glacial; le style puissant et fin de Richard Bausch qui m'avait déjà fait fréquenter les ténèbres il y a quelques années avec son superbe roman La Saison des Ténèbres(Gallimard, Du monde entier, et Folio) et qui récidive ici avec Paix.
De l'autre l'éclatement des voix, la folie du sujet et la mondialisation foutraque d'une guerre contre les zombies de Max Brooks qui a dû être bercé trop près des pellicules des films de son père (c'est le fils de Mel Brooks!)
Paix (Peace), traduit par Jamila Ouahmane Chauvin publié chez Gallimard en novembre 2009.
Richard Bausch raconte un court épisode de la seconde guerre mondiale, pendant la retraite allemande sur le mont Cassin. Cela pourrait être une nouvelle tant tout y est tassé: une journée et une nuit, un petit groupe d'hommes, un acte initial (l'assassinat d'une femme par un des soldats) et une longue nuit d'errance, de doutes et de peur. Mais cette courte fiction révèle une terrible réflexion sur le devoir militaire et le bien éthique, et a toute la force d'un grand roman.
C'est magnifique, de bout en bout.
Voici l'ouverture splendide du roman :
"Ils continuaient quand même, un pied après l'autre, le canon de leur fusil pointé vers le sol pour le protéger de la pluie, en essayant -malgré leur détresse, leur confusion, leur épuisement surtout- de rester sur leurs gardes. Il pleuvait depuis quatre jours, constamment : une pluie sans vent, un déluge glacial et invariable. [...] Impossible de croire que ce fût l'Italie. Non, ils avaient basculé à l'aveuglette dans une contrée noyée de froid, sur un iceberg de mort. Et tout était remis en cause."
World war Z : une histoire orale de la guerre des zombies, traduit par Patrick Imbert et publié chez Calmann Lévy - tout comme Guide de survie en territoire zombie : ce livre peut vous sauver la vie que je n'ai pas encore lu. Signalons également Guide de survie en territoire zombie : attaques recensées (à paraître en avril, adaptation BD)
Comme Chuck Palanhiuk avec Peste, il s'agit ici d'une "histoire orale". Et, pour tout vous dire, c'est comme ça que je l'ai reçu, ce roman. J'ai acheté (7 ou 8 euros) une version légèrement abrégée du roman lue par une quinzaine d'acteurs, dont Max Brooks dans son propre rôle. Évidemment, cette écoute/lecture donne toute sa force à l'aspect oral du livre. Même si j'avais beaucoup aimé Pestepour cette oralité, ce World War Z offre une expérience plus forte par la variété des intervenants.
Il ne faut pas que le sujet vous gêne : oubliez le côté guerre zombie pour vous pencher sur l'aspect humain de ce récit. Max Brooks se fait le reporter de toutes les voix qui, d'une manière ou d'une autre, ont eu maille à découdre avec les zombies : généraux, anonymes civils, simples soldats, chercheurs, familles déplacées, etc, etc. De la Chine à Cuba, des Rocky Mountains à l'Afrique, Max Brooks sillonne le monde (ou ce qu'il en reste) pour recueillir tous ces témoignages.
Le résultat est passionnant de bout en bout, avec des passages d'une force incroyable. Le tableau brossé par toutes ces voix offre un kaléidoscope passionnant et troublant de l'eschatologie à la sauce Brooks. Thriller, de Bambie Jackson, à côté de ça, c'est Disneyland Resort.
Je vais enchaîner sur le Guide de survie en territoire zombie.
On ne sait jamais, ça peut servir!
Voici le début du livre :
"On lui a donné toutes sortes de noms : la Crise, les Années Noires, le Fléau rampant; et d'autres plus modernes ou plus branchés, comme la Zè Guerre mondiale, voire la Première Guerre Z."
En bonus :
un trailer de la BD : http://www.youtube.com/watch?v=IXXxk5be4ns
et du film, adapté du roman :
http://www.youtube.com/watch?v=7sn6mvH3JEg&feature=related
Signé Stéphane.
D'un côté la rigueur et l'économie; le huis clos glacial; le style puissant et fin de Richard Bausch qui m'avait déjà fait fréquenter les ténèbres il y a quelques années avec son superbe roman La Saison des Ténèbres(Gallimard, Du monde entier, et Folio) et qui récidive ici avec Paix.
De l'autre l'éclatement des voix, la folie du sujet et la mondialisation foutraque d'une guerre contre les zombies de Max Brooks qui a dû être bercé trop près des pellicules des films de son père (c'est le fils de Mel Brooks!)
Paix (Peace), traduit par Jamila Ouahmane Chauvin publié chez Gallimard en novembre 2009.
Richard Bausch raconte un court épisode de la seconde guerre mondiale, pendant la retraite allemande sur le mont Cassin. Cela pourrait être une nouvelle tant tout y est tassé: une journée et une nuit, un petit groupe d'hommes, un acte initial (l'assassinat d'une femme par un des soldats) et une longue nuit d'errance, de doutes et de peur. Mais cette courte fiction révèle une terrible réflexion sur le devoir militaire et le bien éthique, et a toute la force d'un grand roman.
C'est magnifique, de bout en bout.
Voici l'ouverture splendide du roman :
"Ils continuaient quand même, un pied après l'autre, le canon de leur fusil pointé vers le sol pour le protéger de la pluie, en essayant -malgré leur détresse, leur confusion, leur épuisement surtout- de rester sur leurs gardes. Il pleuvait depuis quatre jours, constamment : une pluie sans vent, un déluge glacial et invariable. [...] Impossible de croire que ce fût l'Italie. Non, ils avaient basculé à l'aveuglette dans une contrée noyée de froid, sur un iceberg de mort. Et tout était remis en cause."
World war Z : une histoire orale de la guerre des zombies, traduit par Patrick Imbert et publié chez Calmann Lévy - tout comme Guide de survie en territoire zombie : ce livre peut vous sauver la vie que je n'ai pas encore lu. Signalons également Guide de survie en territoire zombie : attaques recensées (à paraître en avril, adaptation BD)
Comme Chuck Palanhiuk avec Peste, il s'agit ici d'une "histoire orale". Et, pour tout vous dire, c'est comme ça que je l'ai reçu, ce roman. J'ai acheté (7 ou 8 euros) une version légèrement abrégée du roman lue par une quinzaine d'acteurs, dont Max Brooks dans son propre rôle. Évidemment, cette écoute/lecture donne toute sa force à l'aspect oral du livre. Même si j'avais beaucoup aimé Pestepour cette oralité, ce World War Z offre une expérience plus forte par la variété des intervenants.
Il ne faut pas que le sujet vous gêne : oubliez le côté guerre zombie pour vous pencher sur l'aspect humain de ce récit. Max Brooks se fait le reporter de toutes les voix qui, d'une manière ou d'une autre, ont eu maille à découdre avec les zombies : généraux, anonymes civils, simples soldats, chercheurs, familles déplacées, etc, etc. De la Chine à Cuba, des Rocky Mountains à l'Afrique, Max Brooks sillonne le monde (ou ce qu'il en reste) pour recueillir tous ces témoignages.
Le résultat est passionnant de bout en bout, avec des passages d'une force incroyable. Le tableau brossé par toutes ces voix offre un kaléidoscope passionnant et troublant de l'eschatologie à la sauce Brooks. Thriller, de Bambie Jackson, à côté de ça, c'est Disneyland Resort.
Je vais enchaîner sur le Guide de survie en territoire zombie.
On ne sait jamais, ça peut servir!
Voici le début du livre :
"On lui a donné toutes sortes de noms : la Crise, les Années Noires, le Fléau rampant; et d'autres plus modernes ou plus branchés, comme la Zè Guerre mondiale, voire la Première Guerre Z."
En bonus :
un trailer de la BD : http://www.youtube.com/watch?v=IXXxk5be4ns
et du film, adapté du roman :
http://www.youtube.com/watch?v=7sn6mvH3JEg&feature=related
Signé Stéphane.
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